Le Domaine départemental de Chamarande continuera en 2024 son exploration du le lien corps & esprit. Ce rapport au corps, à la performance, aux sensations, Abraham Poincheval avait commencé à le confronter dans l’exposition qui lui a été dédiée en 2023 dans le cadre de l’olympiade culturelle, le programme culturel des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024.

Les expositions proposeront d’emprunter la voie résolument philosophique à laquelle invite la pratique sportive en remettant en cause la distinction moderne entre le corps et l’esprit au profit d’un autre mode de rapport au monde, fondé sur l’expérience, comme une forme de pensée par le corps.

L’Occident s’est particulièrement attaché à envisager le physique et l’intellect comme deux entités distinctes – tout en puisant çà et là quelque légitimation antique. Loin d’être l’apanage d’un corps sans esprit, la pratique sportive envisage plutôt les deux en symbiose, comme pour mieux se libérer des carcans et dépasser les limites de soi : il investit le corps pour provoquer l’esprit ; il investit l’esprit pour provoquer le corps. A ce titre, le sportif résiste aux catégorisations faciles dans lequel nous l’enfermions pour s’affirmer comme un entrelacs de corps, d’esprit, d’espace et de temps : il va au-devant du monde, non pas pétri d’un savoir a priori, mais en en faisant l’expérience sensible. Son savoir naît « sur le terrain », au sens propre comme au sens figuré, du contact avec une situation ou un environnement. Ce type de connaissance porte un nom : l’expérience.

Plusieurs pratiques, dont le sport, ont notamment développé cette « expérience » jusqu’à atteindre des phénomènes de transe, d’extase ou de ravissement, que la psychologie du sport appelle « la zone ». Si le sport contemporain s’est approprié cette forme de dépassement de soi qui emporte avec lui tant le corps que l’esprit, de nombreuses pratiques méditatives, mais aussi artistiques s’intéressent à cet état. Si elle est davantage attachée à la musique et à la danse, comment l’art contemporain s’empare-t-il de la transe ?

En raison de la fermeture du château, pour des travaux de rénovation qui démarreront en cours d’année 2024, ce cycle d’exposition va se déployer sur d’autres espaces, à commencer par l’orangerie, mais aussi le parc qui accueillera l’été prochain un parcours d’œuvres, dont certaines monumentales.

3 février > 28 avril : Karine Bonneval

Dans l’orangerie et d’autres lieux : Carte blanche du Domaine départemental de Chamarande à SIANALaboratoire artistique et centre de ressources des cultures numériques et hybrides en Essonne et dans le sud francilien

La pratique artistique de Karine Bonneval est fondée sur l’expérimentation corporelle du vivant. Elle explique que nous sommes trop cérébraux, or pour ressentir les liens qui nous unissent aux autres, humains et non humains, il faut user de notre corps et non uniquement de notre tête. Ainsi nombre de créations de l’artiste propose à chacun de les expérimenter : sentir la sève d’un arbre en se plongeant dans un tapis, se caler dans une sculpture et essayer de nous redresser à la manière d’une plante, écouter ce qui se passe sous nos pieds et entendre la richesse de la vie des sols, etc.

Cette exposition bénéficie du label Olympiade culturelle – Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024

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25 mai > 22 septembre : Laurie Charles

Dans l’orangerie : Carte blanche du Domaine départemental de Chamarande au FRAC Île-de-France, dans le cadre de l’olympiade culturelle, ainsi que du projet global du Frac Île de France pour 2024 intitulé « Vieilles coques et jeunes récifs » soutenu par un ensemble de partenaires dont la Métropole du Grand Paris

Laurie Charles (née en 1987 à Bruxelles en Belgique), vit et travaille à Bruxelles.

Storytelleuse visuelle et textuelle, elle écrit et peint des narrations spéculatives sur des grandes toiles. Dans ses dessins, peintures, sculptures et vidéos, Laurie Charles met en scène des personnages, des symboles et des situations inspirées du réel ou de récits historiques, dont elle propose une relecture féministe. Ses sculptures domestiques prennent la forme de rideaux et de petites sculptures en tissu, rembourrées comme des coussins, dont l’agencement vise la création d’un espace intime. L’artiste y peint des organes, des parties du corps, des animaux ou végétaux, tels qu’illustrés dans des découpes anatomiques : exposant leurs intérieurs. Elle représente la partie invisible du vivant et explore ces représentations de l’intérieur du corps de manière caricaturale, exagérée, pop et immédiatement reconnaissable. En raison des changements survenus dans son propre corps (maladie auto-immune), elle a depuis quelques années développé un travail d’auto-fiction. Elle a ainsi entrepris de réécrire une histoire alternative de la médecine à celle qui a été gravée où il est question de soin, de cycles, de désastre écologique, de guérison. Sa façon de travailler est inextricablement liée à son mode de vie, car le personnel est aussi politique.

25 mai > 27 octobre : Exposition collective “Complexe sportif – (en)jeu de courbes et courbatures

Dans le parc, commissariat Karolina Kazmierska

Tout commence par une grande inspiration d’air et par un cri découlant d’une contraction des muscles intérieurs et extérieurs. La naissance d’une nouvelle vie. Un effort physique et une dépense énergétique comparables à un marathon. Puis, un corps contre un corps et la découverte d’un nouvel espace. Petit, le corps a ce besoin incontrôlable de bouger, de se découvrir et de découvrir l’environnement qui l’entoure. En se déplaçant à quatre pattes, en touchant tout objet sur son chemin, le corps fait une connaissance avec le monde extérieur. L’activité physique l’accompagne tout au long de sa jeunesse.
Et puis le jeu devient un espace d’interactions avec d’autres corps. Le terrain de jeu est un de ces premiers lieux où des mécanismes et des rôles semblables à ceux qu’on jouent dans la société apparaissent.


En substance, l’être humain est issu du mouvement, de la marche, du nomadisme. Et puis avec les modes de vie contemporains, l’humain devient un être sédentaire. Par conséquent son rapport au corps change, évolue.
L’exposition au Domaine de Chamarande est une invitation pour explorer notre relation au corps et à l’activité physique. Le corps du spectateur est lui-même mis en mouvement afin de découvrir le parcours étendu et varié de l’exposition. Les œuvres invitent le spectateur à la participation, par leur dimension relationnelle. Elles représentent et réinterprètent les corps des sportifs en action. Elles dialoguent avec le spectateur par leur échelle importante, mais également, reflètent et renvoient au paysage qui les entoure pour signifier l’importance de notre relation à la spatialité, à l’environnement dans lequel nous vivons.

Visuels :

  • Entête : Karine Bonneval, Jardins mobiles, image extraite du film Jardins mobiles, 2013, © Karine Bonneval / ADAGP
  • vignette : Laurie Charles, Le repos des organes, 2023 (exposition Nos corps anarchiques, Mécènes du Sud, Montpellier) © Laurie Charles / ADAGP

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