Soisy-sous-Montmorency (1947)
Vit et travaille à Paris

Michel Nedjar naît le 12 octobre 1947 à Soisy-sous-Montmorency. Sa mère, Rosette Dina (Szlos), née en Pologne, et son père, René, né en Algérie et maître tailleur, sont arrivés en France au début des années 1920. Ses grands-pères paternel et maternel ont été assassinés à Auschwitz. Troisième d’une famille de sept enfants, il se passionne très tôt pour le dessin puis le tissu : il confectionne des robes pour les poupées de ses sœurs avec lesquelles il joue en cachette, et accompagne sa grand-mère maternelle qui vend des fripes (shmattès) au marché aux puces de Saint-Ouen. C’est avec Nuit et brouillard d’Alain Resnais qu’il découvre en 1961, à l’adolescence, l’horreur de la Shoah ; une plaie désormais à vif qui marquera profondément son œuvre à venir.

Dès la fin des années 1960, Michel Nedjar s’adonne au dessin, notamment à l’occasion de son séjour en sanatorium. Cette pratique prendra souvent à partir de 1978 et jusqu’à aujourd’hui la forme de séries. Les années 1980 verront se développer entre autres celles des Foules (à partir de 1980), des Animo (à partir de 1984) ou encore des Icônes (1986-1989). Au début des années 1970, il voyage à travers le monde, notamment au Maroc, en Inde et au Mexique, où il repère toutes sortes de poupées en chiffons destinées à des rituels étranges. Dès son retour en 1976, il commence la création de poupées puis, deux ans plus tard, de la série Chairdâmes (1978-1998) « poupées » faites de chiffons et de matériaux de récupération, trempées au cours de séances proches de la transe rituelle, dans des bains où se mélangeaient teintures, boue et parfois du sang, quelquefois enterrées puis exhumées. Ses œuvres sont bientôt remarquées par les figures de l’art brut de l’époque : Alain Bourbonnais, Madeleine Lommel, puis Jean Dubuffet qui acquiert une sélection de masques, de poupées et d’œuvres sur papier pour sa collection d’art brut installée depuis peu à Lausanne. L’artiste se tourne également vers le cinéma expérimental, notamment au contact de son compagnon, le cinéaste mexicain Teo Hernández. Il réalise plusieurs films expérimentaux entre 1970 et 1990, auxquels s’ajouteront trois vidéos expérimentales produites au cours des années 2000.

Le début des années 1990 est marqué par une succession de drames personnels liés à l’épidémie du sida. Michel Nedjar se replonge alors dans la fabrication de Chairdâmes à partir de 1995, ainsi que de portraits de proches, d’anonymes ou de figures historiques (Présences à partir de 1990, Visages convoqués à partir de 1993). Il développe par ailleurs une nouvelle série, les Poupées de voyage, à l’occasion d’un séjour sur l’île de Pâques en 1996, et qui s’achèvera en 2013 avec un voyage en Pologne, sur les traces de sa famille maternelle. Les années 2000 voient également l’apparition de nombreuses nouvelles séries à la suite de la commande par le musée d’art et d’histoire du Judaïsme d’une installation pour un théâtre de Pourim (Poupées Pourim, 2004) : Poupées coudrées (2005), Paquets d’objets arrêtés (2006), Poupées enversées (2007), Kalatas (2007), Coudrages (2013) ou encore celles des Objets coudrés (2020).

L’œuvre de Michel Nedjar a été présentée au sein de nombreuses expositions collectives (« Les Singuliers de l’art », ARC, musée d’Art moderne de la Ville de Paris, 1978 ; « Outsiders », Hayward Gallery, Londres, 1979 ; « les jardins barbares », maison de la Culture de la Seine-Saint-Denis, Aulnay-sous-Bois, 1982 ; « Portraits from the Outside : Figurative Expression in Outsider Art », Parsons School of Design Gallery, New York, 1990 ; « Parallel Visions: Modern Artists and Outsider Art », exposition itinérante présentée à Los Angeles, Bâle, Madrid et Tokyo,1992-1993 ; « Art Brut et Compagnie : la face cachée de l’art contemporain », Halle Saint Pierre, Paris, 1995-1996 ; « Art brut : collection de l’Aracine », Musée d’art moderne, Villeneuve d’Ascq, 1997 ; « Made in France 1947-1997 : 50 ans de création en France », MNAM/Centre Pompidou, Paris, 1997 « Selected Works from the Musgrave Kinley Outsider Collection », Tate Britain, Londres, 2005 ; « Le mur, œuvres de la collection Antoine de Galbert », La Maison rouge, Paris, 2014), ainsi que de nombreuses expositions personnelles et rétrospectives (« Michel Nedjar, 10 ans de cinéma 1977-1987 », MNAM/Centre Pompidou, Paris, 1987 ; « Les ongles en deuil », rétrospective itinérante en Allemagne et aux Pays-Bas, 1995-1996 ; « Chairdâme », Halle Saint Pierre, Paris, 2001 ; « Animo.! », rétrospective itinérante en Autriche et en Suisse, 2008-2009 ; « Présences », mahJ, Paris, 2016 ; « Introspective », LaM, Villeneuve-d’Ascq, 2017). Elle fait également partie de plusieurs collections (Collection de l’Art Brut, Lausanne ; La Fabuloserie, Dicy ; LaM, Villeneuve d’Ascq ; MNAM/Centre Pompidou, Paris ; mahJ, Paris ; Collection Antoine de Galbert, Paris ; The Musgrave Kinley Outsider Collection, The Whitworth, Manchester ; Stichting Collectie de Stadshof, Musée Dr.Guislain, Gand ; The Anthony Petullo Collection, Milwaukee Art Museum, Wisconsin ; American Folk Art Museum, New York ; Sammlung Charlotte Zander, Cologne ; Sammlung Scharf-Gerstenberg, Nationalgalerie, Staatliche Museen zu Berlin ; Sammlung Dagmar und Manfred Chobot, Albertina, Vienne).